Crise écologique, crise du capital !

Depuis quelques années, les gouvernements occidentaux prétendent se mettre au vert, parlent de transition écologique ou encore de développement durable. Rénovation des bâtiments, timide réduction de l’empreinte de la voiture en ville ou tentative d’encourager les énergies renouvelables, toutes ces mesures n’ont en réalité qu’un objectif : sauver le système capitaliste. Sentant le vent tourner suite aux mobilisations massives de la jeunesse et du peuple, notamment lors des Grèves du Climat, les États occidentaux dans leur grande majorité ont décidé d’élaborer en catastrophe des solutions contre le désastre climatique qui se profile. Ne soyons pas dupes, les solutions imaginées par ces gouvernements sont peu ambitieuses. La réduction de l’empreinte carbone n’en est qu’une méthode. En somme, les chefs d’État du monde entier cherchent à éradiquer les symptômes de la maladie sans s’attaquer au virus qui les provoque. La crise climatique n’est pas un fait exogène qui ne pouvait pas être évité. Elle est l’une des nombreuses conséquences de l’effondrement d’un système capitaliste en phase terminale qui emporte dans sa chute tout ce qui l’entoure. La destruction de notre planète ne saurait être analysée sans considérer les millions de victimes des guerres impérialistes, les évictions de logement, la paupérisation toujours plus criante des classes populaires, ou bien encore l’exode forcé des populations chassées de chez elles par l’exploitation de leurs terres. Le crime profite toujours au même personne : les bourgeois.

Sur le long terme, c’est seulement par la mise en place d’une économie planifiée orientée vers les besoins de toute la société et en considérant notre impact écologique collectif que nous pourrons construire un avenir. Tant que les moyens de production seront aux mains de la bourgeoisie capitaliste, aucune perspective d’avenir n’est possible. Pour la bourgeoisie, seule l’accumulation croissante du capital compte ; dans son appétit insatiable de profit, la bourgeoisie sacrifie les solutions justes et efficaces pour toutes et tous. En 2019, le 1% a pollué plus que les  66% les plus pauvres de la population mondiale, soit plus de cinq milliards de personnes.

Dans son dernier rapport, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) attribue explicitement la responsabilité du réchauffement climatique à l’activité humaine, donc au mode de production libéral. Si des changements drastiques ne sont pas faits rapidement, le réchauffement du climat s’aggravera et les conséquences seront globales et destructrices. Les premières populations touchées, qui pour certaines le sont déjà, seront celles de l’hémisphère sud qui pourtant sont celles qui produisent le moins de pollution. Élévation du niveau de la mer, disparitions d’espèces, dérèglement des écosystèmes, sécheresses, amoindrissement de la production alimentaire, approfondissement des injustices sociales, déplacements massifs de population, toutes ces répercussions sont annoncées noir sur blanc. Les rapports publiés par le GIEC montrent que notre société capitaliste va droit dans le mur. Ce groupe tire la sonnette d’alarme depuis plusieurs décennies. Cependant, ceux qui ont lancé sa création, les pays du G7, font la sourde oreille et préfèrent protéger la croissance économique.

La lutte écologique est souvent difficile à appréhender pour bon nombre d’entre nous, car elle semble abstraite ou individualisante. En effet, trop fréquemment, elle est réduite à une question de responsabilité individuelle, de choix de consommation qui devrait être « plus vert », de recyclage ou de diminution de consommation personnelle d’électricité ou de carburant. Pire encore, ces arguments sont continuellement utilisés par une partie de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie afin de s’attaquer aux classes populaires, rendues responsables d’une crise climatique dont elles sont pourtant les premières victimes. Ces dernières qui se battent déjà pour boucler leurs fins de mois, se voient matraquer des injonctions à consommer bio ou à acheter un vélo électrique pour aller au travail.

Le mythe du choix responsable ou vert, à l’échelle individuelle, que défend une partie de la gauche repose sur une analyse erronée du capitalisme. Les possibilités d’influencer et de changer radicalement le système ne sont pas du côté de la consommation, mais bien de la production. Les choix de consommation entretiennent une illusion qui permet aux petit-bourgeois d’apaiser leur conscience en achetant leurs légumes dans la ferme proche de leur écoquartier. Produits bio, vélos électriques, panneaux solaires et tous les autres produits dits « écologiques » sont avant tout de nouvelles ouvertures de marché pour le capitalisme.

Remettre en question et repenser notre mode de vie tant au niveau collectif qu’individuel est une évidence, mais la vision individualisante de l’écologie libérale est une voie sans issue. Pour prendre un exemple local, à elles seules, les cinq entreprises suisses Holcim, Lonza, Jura Materials, Vigier Ciment et Varo émettent autant de CO2 annuellement que les populations des cantons de Fribourg, du Valais et du Jura réunies. De plus, toutes les diminutions récentes de l’empreinte écologique sur le territoire helvétique se sont vues annulées par l’augmentation des émissions suisses à l’étranger, et ce, principalement dans les pays du Sud.

Aujourd’hui, c’est par l’action politique, le blocage, le sabotage, la grève et tout en gardant comme but final la réappropriation des moyens de production, que nous pouvons sérieusement influencer sur notre empreinte écologique. En s’attaquant aux multinationales de l’agro-alimentaire, aux géants du pétrole, aux grandes enseignes de la distribution, aux entreprises gérant la logistique du capitalisme ou aux banques qui les financent, nous enrayons la production capitaliste, et donc la destruction de l’environnement.

En Suisse, nous avons le privilège de ne pas encore subir toutes les conséquences du changement climatique. Si certains symptômes, tels que la fonte des glaciers, les crues exceptionnelles ou les sécheresses, sont, en effet, perceptibles en Europe, l’hémisphère sud est cependant la région qui paie le prix fort. Cette distance qui nous sépare des conséquences directes du réchauffement climatique participe au sentiment d’impuissance qui touche les européens.  La déforestation, la fonte de la banquise, ou bien encore la montée des eaux apparaissent comme des problèmes lointains. Or, considérer que nous ne sommes pas au centre de la crise climatique est une erreur. Certes, il est difficile de se tenir au côté de celles et ceux qui s’interposent physiquement entre les tronçonneuses et la forêt primaire, mais notre rôle en tant que militants résidant dans l’œil du cyclone capitaliste est autre. Autour de nous, à chaque coin de rue se trouvent les sièges sociaux, directions générales et bureaux logistiques des entreprises ordonnant la destruction de la biosphère.

En plus de contribuer activement au réchauffement de la planète à travers leurs émissions de gaz à effet de serre, les entreprises implantées à Genève et en Suisse romande jouent un rôle clé dans le trading de matières premières, l’extraction de ressources et la logistique du commerce international. Ainsi, plus de 50 % des céréales, 40 % du sucre et 30 % du café et du cacao négociés dans le monde le sont par des sociétés helvétiques ou établies sur notre territoire. 

Tout en ayant pignon sur rue, certaines de ces sociétés comme Cargill font partie des responsables de la déforestation intensive ayant cours en Amazonie. La destruction du Sud de la planète commence au coin de nos rues. Alors que nos camarades s’attaquent aux bras des multinationales partout dans le monde, il est de notre devoir de les frapper directement au cœur. Ces entreprises planifient, échangent, s’enrichissent et détruisent impunément depuis nos villes, depuis nos quartiers ! 

Il est temps d’affronter le capitalisme là où il se sent intouchable, car il ne peut pas y avoir de paix sans justice et il ne peut pas y avoir d’écologie sans lutte des classes !

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